L’IA a le potentiel de rendre les assurances plus inclusifs
L’IA a la capacité de révolutionner, à terme, le secteur de l’assurance en changeant à jamais la relation entre l’assureur et l’assuré, et ce pour le meilleur. Mais les enjeux sont plus vastes. L’IA soulève également des questions éthiques pour l’industrie.
Donner le contrôle au client
L’assurance a toujours été une grande consommatrice de données. Peut-être est-ce seulement aujourd’hui, grâce à l’IA, que nous pouvons véritablement libérer toute la puissance de ces données pour nos clients. L’IA permet d’analyser de grandes quantités de données personnelles et de mieux cerner les facteurs de risque, les préférences individuelles et les modèles de comportement. Allons-nous adapter une assurance automobile à l’utilisation de la voiture et au comportement de son conducteur ? Devrions-nous relier les appareils connectés du domicile de notre client à son assurance incendie ? L’intelligence artificielle nous permet d’intégrer la connaissance des données dans nos activités à tous les niveaux afin d’hyper-personnaliser nos offres et de simplifier les processus, donnant ainsi plus de contrôle au client. Les parcours ordinaires des clients se transforment peu à peu en interactions basées sur des données, des couvertures et des primes adaptées à leurs besoins individuels. Ironiquement, la technologie a véritablement le pouvoir d’humaniser le secteur de l’assurance.
L’IA modifie le regard que nous portons sur le risque.
Mais cette nouvelle focalisation sur l’évaluation des risques individuels pourrait-elle également modifier les fondements du modèle de risque utilisé par les assureurs, qui a bien servi la société pendant des siècles ? L’assurance se fonde sur la mise en commun et la mutualisation des risques — en répartissant le coût des pertes subies par les moins chanceux sur l’ensemble de la collectivité — et s’appuie sur une ferme conviction en l’équité. Historiquement, les assureurs ont toujours fondé leurs décisions sur les risques de groupes de clients partageant certains éléments inconnus. L’IA est en mesure de calculer la probabilité qu’un risque se produise au niveau de l’individu. On pourrait imaginer que dans ces conditions, les assureurs se concentrent d’abord sur la sélection des « meilleurs » types de risques, en choisissant les clients dont on prévoit qu’ils présenteront les demandes d’indemnisation les moins élevées. Cette évolution pourrait à son tour créer un « vide » dans l’assurance, avec l’apparition d’un plus grand nombre de risques « inassurables ». Il n’est pas surprenant que l’EIOPA, le régulateur européen des assurances, accorde autant d’attention à l’équité et à l’éthique dans ses considérations réglementaires sur l’IA. Après tout, cette question est au cœur de la nature même du métier d’assureur. En absorbant l’incertitude pour permettre aux citoyens de vivre pleinement leur vie, nous constituons un facteur de stabilisation essentiel de la société.
Les assureurs devraient collaborer
En tant que secteur, nous devons travailler ensemble pour veiller à ne pas créer ce type de « vide » susceptible de désavantager les consommateurs et d’accentuer les disparités dans la société. Les acteurs du secteur doivent accepter de coopérer et de définir une méthode de travail qui renforce les principes éthiques sous-jacents de l’assurance. Notre rôle en tant qu’assureur responsable est de veiller à offrir à un maximum de nos concitoyens la sérénité en sachant qu’ils sont couverts en cas de problème.
Bénéficier de la puissance des données
La bonne nouvelle, c’est qu’il existe de multiples possibilités. L’hyperpersonnalisation de la souscription dans le domaine de la santé peut favoriser les assurés en bonne santé, mais pourrait empêcher les clients les plus démunis d’obtenir une assurance sur leur prêt hypothécaire lorsqu’ils cherchent à acheter une maison. D’un autre côté, nous pouvons exploiter les informations fournies par les appareils connectés pour promouvoir des modes de vie sains et améliorer le profil de risque d’un client. Cela nous permettrait par exemple de proposer des solutions aux patients diabétiques afin qu’ils puissent construire un nid douillet pour leur famille. Le changement climatique élargira les zones exposées aux inondations et aux vagues de chaleur, laissant un plus grand nombre de citoyens vulnérables sans assurance. L’IA peut nous aider à mettre en place une meilleure diversification géographique et des systèmes d’alarme préventifs pour généraliser la couverture que nous offrons en cas d’incendie ou d’inondation. L’utilisation de l’IA pour exclure ou éviter les risques augmentera la rentabilité des assureurs, mais l’impact sur la société sera très différent ! L’intelligence artificielle peut être un outil qui accroît l’exclusion ou promeut l’inclusion. Le choix nous appartient !
Faire ce qu’il faut en tant qu’assureurs
Nous avons le devoir d’examiner les implications plus larges que l’IA peut avoir sur l’avenir de notre secteur d’activité. C’est en coopérant que nous y parvenons, sans oublier le rôle important que jouent les assureurs en tant que filet de sécurité pour la société. Aujourd’hui, nous nous trouvons à la croisée des chemins pour décider de l’exclusion ou de l’inclusion de notre industrie. Il est de notre devoir de protéger l’intégrité de l’assurance et de maximiser la valeur qu’elle apporte à tous. La direction que nous prendrons sera fondée sur l’intelligence humaine.
Hans De Cuyper
CEO d’Ageas